❤️❤️❤️❤️❤️ LA CHANSON DU RAYON DE LUNE de TONIE BEHAR

Il y a des romans qui provoquent un effet de plénitude, une envie irrépressible de les terminer et un pincement au coeur en les quittant.

La chanson du rayon de lune de Tonie Behar (éditions Charleston) fait partie de cette catégorie. J’avoue envier le lecteur qui aura la chance de plonger pour la première fois dans les aventures des deux courageuses héroïnes animées par la même passion et qui vivent à des époques différentes.

Les pages s’enchainent à une rapidité folle, le lecteur est balloté entre le Paris et le Deauville d’aujourd’hui et celui magistralement bien décrit de la fin du XIX ème siècle. La romancière Tonie Behar réussit à embarquer le lecteur dans une histoire à multiples facettes, tout à la fois roman historique sur l’émancipation des femmes, enquête policière, passions amoureuses intenses qui défient le temps…

L’histoire…

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Amanda vit aujourd’hui à Paris, boulevard Montmartre, situé sur les grands boulevards dans un bel immeuble construit sous le second empire. Créatrice de bijoux, elle se consacre principalement à son travail. Elle découvre par hasard en faisant ramoner sa cheminée une bague en opale, le Rayon de lune et un paquet de lettres. Il s’agit de la correspondance amoureuse entre Joséphine, une simple couturière déterminée à conquérir sa liberté et Antoine, un riche notable.

Sensible à l’histoire émouvante de Joséphine, Amanda décuple ses forces pour retrouver la bague mystérieusement disparue et élucider un meurtre dont elle est accusée.

Ce que j’ai aimé…

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Tout d’abord, découvrir l’univers des grisettes, terme qui désigne du XVIII ème au XIX ème siècle une jeune ouvrière de la confection (couturière, modiste, dentelière, vendeuse ) qui vivait en ville avec de faibles revenus. La grisette avait la réputation d’être sexuellement accessible. Elle a inspiré de nombreux écrivains tels que Honoré de Balzac, Alfred de Musset, Eugène Sue, George Sand. Tonie Behar fait revivre la mémoire d’une grisette, Josephine, tout en rendant hommage à son courage face aux difficiles conditions de vie. La romancière rappelle à juste titre que les femmes à cette époque, pas si lointaine, n’avaient pas plus de droit qu’un enfant. Les femmes ne pouvait pas disposer de leurs biens, ouvrir librement un compte bancaire ou créer une société sans l’accord du mari. Droits rendus possibles en France le 13 juillet 1965 et en Suisse le 1er janvier 1988 !

Soucieuse du détail, Tonie Behar adapte le vocabulaire et les expressions de Joséphine
en fonction de son évolution sociale et du langage parisien du XIX ème siècle. De même, lors de l’enquête policière à notre époque, la romancière s’appuie sur le déroulé d’une véritable procédure judiciaire pour la rendre plausible.

La passion amoureuse et le désir de liberté sont au coeur du roman avec les tourments, les déceptions et les palpitations de la vie. Tonie Behar spécialiste des comédies romantiques excelle en la matière. Elle ne se prive pas de nous émouvoir et de jouer avec nos nerfs.

Tonie Behar rappelle également l’histoire de la Société protectrice des animaux, reconnue d’utilité publique en 1860 et qui a été créée par les docteurs Pierre Dumont de Montreux et Étienne Pariset. A cet égard, l’auteure profite de son roman pour attirer l’attention du lecteur sur les horribles conditions actuelles que subissent plus de 100 000 juments en gestation. Le célèbre laboratoire Pfizer prélève l’urine en assoiffant les juments sans se préoccuper du bien-être des animaux, et cela pour traiter les inconvénients de la ménopause. La Suisse et la France ont d’ailleurs retiré ce médicament du marché en raison de la dangerosité. Le laboratoire Pfizer continue de le vendre…Dans la vraie vie, Tonie Behar propose de signer la pétition pour interdire ces violences.

https://www.change.org/StopPremarin

Vous l’aurez compris, j’ai passé un très agréable moment de lecture, tout à la fois intense, léger et instructif. Je vous conseille vivement La chanson du rayon de lune.

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Ce matin-là de Gaëlle Josse ❤️❤️❤️❤️❤️

Inconditionnelle des romans de Gaëlle Josse, je ne pouvais pas passer à côté de « Ce matin-là », édité en janvier 2021 en Suisse par Noir sur Blanc dans la collection Notabilia.

L’écriture de Gaëlle Josse a le pouvoir de laisser une empreinte forte dans la mémoire. Alors, impossible pour moi d’oublier « Une femme en contre-jour « , « Une longue impatience« ,  » Le gardien d’Ellis Island« …

« Ce matin-là » décrypte, avec talent, de manière bouleversante la traversée d’une femme dans les méandres de la dépression. La lumière est-elle au bout de cette descente aux enfers ?

L’histoire…

Clara est une jeune femme dynamique, en couple qui travaille avec succès, en qualité de chargée de clientèle, dans une société de crédit. Un matin, avant de partir travailler, son véhicule ne démarre pas, son corps épuisé la lâche. C’est alors qu’elle s’enfonce progressivement et violemment dans la dépression.

Elle n’arrive plus à supporter les contraintes professionnelles et les mesquineries de sa supérieure hiérarchique. Elle perd le goût de la vie, au point que son compagnon désarmé la quitte. Sa vie part à la dérive et le vide abyssal s’ouvre devant elle.

Quelles sont les raisons de la chute de Clara en apparence forte et joyeuse ? Va-t-elle pouvoir surmonter cet effondrement intérieur ? Va-t-elle raccorder sa vie ?

Pourquoi vous allez aimer…

Le sujet de la dépression est universel et susceptible de concerner tout le monde. Toutefois, ce thème n’est pas facile à traiter en littérature. Gaëlle Josse avec sa double casquette d’écrivaine observatrice et de psychologue clinicienne réussit sans tomber dans le larmoyant et les jérémiades à dépeindre au plus près les différentes étapes de la dépression.

Elle apporte, avec son écriture limpide, un éclairage sur les causes de l’effondrement intérieur qui sont multiples et remontent souvent à l’enfance, comme pour Clara qui a renoncé à un projet professionnel.

La deuxième partie du roman, riche en émotions est jubilatoire. Elle se lit comme une consolation avec les petits riens, les bonheurs et désirs simples qui constituent le sel de la vie.

« Entendre Cécile, sa voix posée, a fait passer un courant d’énergie en elle ; elle se dit qu’il y a des êtres, comme ça, qui ont le talent, ce don d’éclairer, d’alléger la vie de ceux qui les côtoient, qui savent adoucir les tracas qui leurs sont confiés, parfois au risque de trop en porter eux-mêmes. »

ce roman délicat apporte espoir et sérénité, une main posée sur l’épaule.

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JACKIE ET LEE de Stéphanie des Horts

J’ai eu envie de lire une histoire glamour afin de m’évader tout simplement de l’ambiance actuelle. Rien de tel que de suivre le destin romancé et croisé de Jackie et Lee Bouvier, écrit par Stéphanie des Horts. Elle réussit à ressusciter parfaitement l’atmosphère trépidante et hors du commun de la vie du clan Kennedy.
Les deux sœurs inséparables et rivales nous entraînent aux États-Unis, dans le secret d’une relation ambivalente, entre passions, orgueil et jalousie.
Qui était Lee, la sœur cadette de Jackie ? Comment s’est-elle construite face à son imposante et charismatique aînée ? Stéphanie des Horts lève le voile sur ce lien tourmenté. Régalez-vous en suivant ces deux pestes intelligentes, mondaines au cœur de cette période dorée du siècle dernier, à tout jamais révolue !

L’histoire…

Dès leur plus jeune âge, les soeurs Bouvier sont éduquées dans le but d’épouser des hommes influents et riches. Pour leur mère Janet, femme sèche et sans scrupules, «Il y a deux choses essentielles dans la vie. L’argent et le pouvoir. Ce sont les nerfs fondamentaux de la guerre et le secret du bonheur éternel… ». D’ailleurs, celle-ci quitte rapidement leur père peu fortuné, pour épouser en seconde noce, Hugh Dudley Auchincloss, un riche avocat américain.
Jackie grandit dans cette optique jusqu’à épouser le flamboyant John Kennedy, qui deviendra le 35ème président des Etats-Unis. En parallèle, sa soeur, éternelle petite dernière s’unit au prince polonais désargenté, Radziwill. Pourtant Inséparables, elles n’hésitent pas à se voler leurs amants et se disputent même les faveurs de l’armateur Aristote Onassis.
Elles s’entourent de Cecil Beaton, Andy Warhol, Mick Jagger, assistent aux plus belles fêtes de l’époque, dont le célèbre bal Noir et Blanc de Truman Capote. Malgré les drames et les désillusions, Jackie reste dans la lumière, sous les feux des projecteurs, tandis que sa sœur Lee qui s’ennuie, cherche à s’étourdir.

Pourquoi vous allez aimer…

Stéphanie Des Horts au talent de conteuse incontestable fait revivre la « Café Society » microcosme mondain et cosmopolite, remplacé depuis par la jet-set. Le défilé de célébrités, les descriptions de l’art de vivre et l’état d’esprit de l’époque permettent une immersion totale dans le passé.
Au travers d’un travail documenté, la romancière nous plonge avec peps et sans complexe dans l’intimité de ces deux femmes séductrices et manipulatrices. Elle n’hésite pas à s’amuser de ses héroïnes poussées par l’ambition et la rivalité et à révéler leurs coups bas.
Ces deux chipies restent malgré tout attachantes et particulièrement la frêle et frivole Lee. Cette dernière a d’ailleurs inspiré le personnage de Holly dans le célèbre roman de Truman Capote « Diamants sur canapé” (Breakfast at Tiffany’s) interprétée par Audrey Hepburn au cinéma.
Je vous conseille cette biographie de Jackie et Lee qui offre une histoire passionnante et parfaitement documentée, à la fois pétillante et tragique.

L’énigme de la chambre 622 de Joël Dicker

Impossible de passer à côté de la sortie tonitruante du dernier ouvrage de Joël Dicker

« L’énigme de la chambre 622 ». D’autant que cette fois, ce nouveau polar dans lequel Joël, l’écrivain, se met personnellement en scène, ne se déroule pas aux États-Unis comme les précédents, mais en Suisse, son pays natal.

A peine sorti en librairie « L’énigme de la chambre 622 » fait déjà partie des meilleures ventes. Le jeune romancier est d’ailleurs l’un des auteurs francophones les plus lus, avec “La vérité sur Harry Québert”, lauréat du prix du roman de l’Académie française et Goncourt des lycéens, “Le Livre des Baltimore” et “La Disparition de Stéphanie Mailer”.

Que s’est-il passé dans la chambre 622 du Palace de Verbier ? Comment Joël Dicker réussit-il une fois de plus à nous tenir en haleine, tout en nous divertissant ? Cette énigme est également à découvrir…

L’histoire…

A la suite d’une rupture amoureuse douloureuse et la mort de son éditeur Bernard de Fallois, un séduisant écrivain à succès prénommé Joël, est en panne d’inspiration. Il quitte précipitamment Genève pour se reposer et oublier sa peine de cœur dans un magnifique Palace au cœur de Verbier. Son repos est de courte durée, car la dynamique Scarlett, nouvellement rencontrée, lui propose de résoudre l’énigme non élucidée du meurtre qui s’est déroulé quinze ans plus tôt, dans la mystérieuse chambre 622. Ils partent sur les traces de la victime et de plusieurs personnages énigmatiques qui pourraient être impliqués.
Entre passé et présent, l’histoire se met en place autour d’une lutte de pouvoir pour obtenir la présidence d’une banque suisse. Qu’est-il arrivé au jeune banquier Marcaire que le père a évincé de la Présidence ? Sa femme Anastasia peu impliquée dans le mariage a-t-elle joué un rôle dans cette funeste histoire ? Lev l’ami irrésistible et banquier de talent est-il aussi sympathique qu’il en a l’air ? L’avidité pour le pouvoir serait-elle à l’origine du meurtre ?

Pourquoi vous allez aimer…

Joël Dicker est un conteur qui prend plaisir à révéler au compte-gouttes l’histoire et à déstabiliser son lecteur en le provoquant grâce aux nombreux rebondissements.

Pour cela, il utilise deux temporalités qui se mêlent : le présent au travers de l’enquête sur ce meurtre, menée par l’écrivain, et le passé qui réapparaît au rythme des allers-retours « 16 ans plus tôt » « Cinq mois plus tôt » « La veille du meurtre »…Nous suivons docilement l’auteur à travers les années, d’autant qu’il se met en scène dans un jeu de fiction et de réalité. A travers le regard de Joël, nous cheminons dans Genève et y découvrons avec plaisir quelques bonnes adresses, comme par exemple le restaurant japonais de l’hôtel des Bergues, le restaurant du Parc des Eaux-Vives, le café le Remor, le salon de thé de l’hôtel Beau-Rivage…

Restaurant du Parc des Eaux-Vives

Joël tout à la fois narrateur et écrivain rend un hommage émouvant et reconnaissant à son éditeur Bernard de Fallois décédé en 2018. Il en profite pour donner ses impressions sur l’envie d’écrire. Entre le roman policier et le vaudeville où virevoltent meurtre, jalousie, trahison, appât du gain, le lecteur se laisse prendre au jeu. Ce roman à l’écriture fluide et agréable offre un appréciable moment de détente et de divertissement.

Un polar léger, au sens noble du terme que je vous conseille vivement.

DES QUESTIONS À JOËL DICKER ?

-Sandrine Bourgeois : Pouvez-vous en quelques mots présenter votre roman ?

Joël Dicker : C’est l’histoire d’un écrivain qui, après le décès de son éditeur et une déception sentimentale, décide de partir en vacances dans un palace de montagne. Arrivé sur place, il découvre que la chambre voisine de la sienne a été le théâtre d’un meurtre jamais résolu et il décide de rouvrir l’enquête.

-S.B : Le personnage principal est un écrivain qui vit à Genève et se prénomme Joël comme vous , pour quelle raison avez-vous choisi ce prénom ? Est-il votre double ?

Joël Dicker : J’ai décidé d’y ajouter une partie romanesque, pour laquelle il m’a semblé cohérent que le narrateur s’appelle aussi Joël. Ce n’est pas moi, même si je joue un peu de ce jeu de la fiction et de la réalité dans ce roman. Ce roman est aussi un hommage à Bernard de Fallois, mon éditeur, décédé en janvier 2018. J’y raconte quelques anecdotes sur nos aventures éditoriales, c’était d’ailleurs le point de départ du livre.

-S.B : Quel est votre personnage féminin préféré dans le roman et pour quelles raisons ?

Joël Dicker : Je crois que c’est Scarlett car elle apporte une touche de fraîcheur au livre. Et c’est grâce à son caractère impulsif que l’écrivain se lance dans cette enquête.

-S.B : Pensez-vous comme Anastasia, la femme de Macaire que « les hommes qui se plient en quatre sont des hommes conquis et la passion ne survit pas à la conquête ?

Joël Dicker : Les personnages de mes romans ne sont pas mes porte-paroles. Je pense que la passion peut se poursuivre longtemps dans un couple, tant que chacun veut bien l’entretenir.

-S.B : Quelle impression souhaitez-vous laisser au lecteur après la lecture de votre roman ?

Joël Dicker : L’impression d’avoir vécu un moment réel. Que tout cela a eu lieu, que les personnages ont été vraiment présent et que l’univers de ce roman leur manquera et leur donnera envie de se replonger dans d’autres livres. La littérature est d’une telle richesse !

S.B : Quels sont les écrivains qui vous inspirent et votre dernier coup de cœur littéraire ?

Joël Dicker : Les écrivains qui m’ont inspiré sont Romain Gary, Marguerite Duras, Albert Cohen, Dostoïevski et Philip Roth. L’un de mes derniers coups de cœur : 1793, de Niklas Och Natt Dag, chez Sonatines.

S.B : De nationalité suisse, quelle place tient le chocolat pour vous ?

Joël Dicker : Une place importante, d’abord parce que j’aime ça. Egalement parce que le chocolat c’est l’identité de la Suisse. Et puis, je ne vous cache que j’ai repris avec un ami une chocolaterie à Genève, la chocolaterie du Rhône.

Une évidence d’Agnès Martin-Lugand

J’ai été une fois de plus touchée par le roman d’Agnès Martin-Lugand « Une évidence ».

La romancière dresse ici avec subtilité le portrait d’une femme qui fait face à l’adversité et à ses erreurs passées. Pas facile de ne pas laisser couler quelques larmes lors de la lecture de ce récit…

L’histoire…
Reine est une mère célibataire qui élève à Rouen son fils Noé âgé de dix-sept ans. Très entourée par sa famille soudée, elle se consacre à son fils et à son travail dans une agence de marketing, dirigée par un ami fidèle. Reine protège jalousement son fils et s’inquiète de son départ programmé de la maison.
Soudain, sa vie vole en éclats lorsqu’elle rencontre à Saint-Malo un client, qu’elle a bien connu dans le passé. La vérité la rattrape. Comment faire face à ses propres mensonges ? Peut-on mentir pour protéger ceux qu’on aime ? Comment avouer la vérité au risque de perdre la confiance de son entourage ?

Pourquoi vous allez aimer …
D’abord, Agnès Martin-Lugand nous entraîne à la découverte de la sublime ville de Saint-Malo, située dans le nord-est de la Bretagne, sur le littoral de la Manche. La force de la nature et la beauté des remparts depuis Grand Bé apportent une intensité particulière à cette histoire. La romancière nous offre une belle visite guidée dans la ville des vacances de son enfance.
Ensuite, Agnès Martin-Lugand qui a étudié la psychologie, a le don d’explorer au plus profond et avec minutie l’âme humaine. Elle sait parfaitement transcrire en mots les sentiments subtils de ses personnages attachants qui prennent vie devant nous. On s’identifie rapidement à Reine, une femme sensible et complexe. La crainte d’affronter la chambre vide, suite au départ de son fils est particulièrement bien analysée et concerne tous les parents.Le petit coin lecture conseille ce joli roman sensible, aux personnages fouillés et intenses. Une idée de livre à emporter dans les bagages pour les prochaines vacances.

Après six romans à succès vendus à plus de 3 millions d’exemplaires et traduits dans trente-deux pays, Agnès Martin-Lugand persiste pour notre grand plaisir à jouer avec nos sentiments.
Nous avions aimé « Les gens heureux lisent et boivent du café « Entre mes mains, le bonheur se faufile. »…

Rencontre au Salon du livre de Genève d’Agnès Martin-Lugand : une femme lumineuse, attentive aux autres.

Agnès Martin-Lugand

Sandrine Bourgeois : Racontez-nous votre expérience magique d’écrivain ?

Agnès Martin-Lugand : Tout est allé très vite, ma rencontre avec les lecteurs et mon éditeur Michel LAFON. Et ce qui est merveilleux, c’est que j’ai la possibilité d’écrire d’année en année avec toujours autant de plaisir.
Les lecteurs qui sont au rendez-vous depuis six ans m’apportent énormément. Ce sont des rencontres bouleversantes qui me nourrissent. Ils portent mes personnages à ma place.
La dimension magique de ce que je vis, ce sont les traductions de mes romans à l’étranger, dans une langue qui n’est pas la mienne. Je me suis aperçue que peu importe la langue, la culture, l’ histoire, le contexte géopolitique, finalement l’être humain se retrouve sur les émotions, sur le chagrin, sur le rire, sur l’amour, sur l’amitié, sur la famille. C’est très rassurant sur l’être humain et très enrichissant. Toute la magie au-delà du plaisir de l’écriture se saisit dans les rencontres humaines. Je ne m’attendais pas en écrivant à toutes ces rencontres extraordinaires.

S.B. : Comment écrivez-vous ?

AML : Je n’écris qu’en musique, j’ai partagé à la fin du livre “Une Evidence”, la playlist qui suit la chronologie du roman. Ces musiques m’inspirent, nous soutiennent et nous accompagnent, mes personnages et moi

S.B : Comment faites-vous pour explorer aussi finement la nature humaine ?

AML : Je suis passionnée par les réactions et les mécanismes psychiques que l’on met en place pour avancer dans la vie et essayer de s’en sortir plus ou moins bien. Pourquoi fait-on des mauvais choix ? Pour qui ? Comment batailler avec soi-même et avec les autres ? Comment cicatriser ses blessures ? J’aime dans l’écriture réussir à trouver les mots pour faire ressortir une émotion.

S.B : Comment construisez-vous vos personnages ?

AML : Je me mets à la place de mes personnages et je m’efface derrière eux. Je dois être en fusion avec eux pour commencer à écrire et je me laisse ensuite littéralement cueillir. Il y a un lien magique qui s’opère. Tout ce que le personnage va sentir, je vais le ressentir également. Dans mon dernier roman « une Evidence », le personnage principal Reine n’est pas moi, mais elle prend ma place. Je pleure avec Reine. Je tombe amoureuse et vibre avec elle. Je ressens dans mon corps ce qu’elle ressent.

S.B : Pouvez-vous nous expliquer le choix du titre « Une Evidence »? .

AML : Pour la première fois, un titre court s’est imposé à moi tardivement. Dans une idée de lâcher prise, je n’ai pas voulu me forcer à trouver un titre long qui n’aurait pas de sens alors que j’en ai trouvé un court qui raconte une histoire à lui tout seul.

S.B : Pourquoi avoir choisi le thème principal du mensonge pour votre dernier roman ?
AML : Il y a plein d’histoires à raconter derrière le mensonge. Pourquoi ment-on ? Pour se protéger ? Pour protéger les autres ? Comment vit-on avec le mensonge ? Ce qui m’intéressait avec « Une évidence” était de voir comment Reine s’est enfermée dans son mensonge et avait fini par y croire. Alors, comment passe-t-on du mensonge au pardon ? Et comment peut-on se pardonner soi-même ? C’est un champ des possibles fascinant pour un auteur.

S.B: Votre dernier roman se déroule en grande partie à A Saint-Malo, pouvez-vous nous conseiller une visite particulière dans cette ville ?

AML : C’est une ville importante pour moi. Je vis à Rouen, mais une partie de ma famille vit à Saint-Malo où je suis née. il faut faire avant tout le tour des remparts. Ce qui donne une bonne perspective de la ville.

Un grand merci à Agnès Martin-Lugand pour avoir consacré un moment à Sourire aux livres.

La soustraction des possibles de Joseph Incardona

Je vous avoue avoir été mise agréablement sous pression par le roman sulfureux de Joseph Incardona au titre énigmatique « La soustraction des possibles » qui se déroule en grande partie à Genève. L’auteur qui n’est pas à son coup d’essai dresse un portrait détaillé et sans concession de Genève et du monde de la finance de la fin des années 1980.
Tout à la fois une étude de mœurs, un thriller palpitant et une histoire d’amour, ce roman ne laisse pas une minute de répit et tant mieux. L’ascension vers la fortune affole et fait prendre des risques…trop de risques ?

L’histoire

Aldo Bianchi, au physique ravageur, professeur de tennis à Genève pour les personnes fortunées, ne se suffit plus de sa simple vie. Il veut devenir riche, et accéder à la richesse qui s’étale sous ses yeux dans les belles propriétés du bord du lac de la Rive gauche du lac.
Gigolo à ses heures, il profite de la généreuse Odile, la femme de René Langlois, un fortuné banquier. La cinquantaine non assumée, Odile trouve réconfort et sensualité débridée auprès d’Aldo. Pour ne pas perdre son amant avide d’argent, Odile lui propose de transporter discrètement des sacs entre la France et la Suisse. L’engrenage commence, jusqu’à sa rencontre avec la ravissante et ambitieuse banquière Svetlana.

Pourquoi vous allez aimer…

L’histoire tragique bien ficelée permet au lecteur, un retour en arrière, sur la fin d’une époque du florissant milieu bancaire genevois des années 80. L’auteur décrit avec délectation l’argent qui n’a pas d’odeur, la fraude fiscale et les valises remplies de billets.
Genève où l’intrigue se déroule, y tient une place centrale. L’auteur offre au lecteur une visite guidée de la ville, et de ses quartiers cossus jusqu’aux aux barres d’immeubles. Les belles communes environnantes de Collonge-Bellerive, Cologny, Vandœuvres, y sont également décrites. Dès les premières pages l’histoire du Parc des Eaux-vives qui trône dans toute sa majesté face au lac y est relatée.
Joseph Incardona qui aime les détails historiques et géographiques, sait aussi analyser avec finesse l’âme humaine. Les personnages avides d’argent, aux nombreux défauts et faiblesses restent malgré tout attachants.
L’auteur n’hésite pas, de manière originale, à intervenir dans la narration en faisant part de ses réflexions personnelles sur les décisions de ses personnages, sur le temps qui passe et le monde en évolution.
Ce qui donne du dynamisme à l’écriture et un lien étroit avec ce que pense le narrateur. Laissez-vous entraîner, vous ne serez pas déçu, dans cette intrigue aux nombreux rebondissements et faites un bond en arrière dans le Genève révolu et complexe des années 1980.

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Isabelle l’après-midi de Douglas Kennedy

Une nouvelle fois, j’ai succombé à un ouvrage de l’écrivain américain à succès, Douglas Kennedy. Ce nouveau roman sensuel et nostalgique « Isabelle, l’après-midi », au titre prometteur, évoque le film d’Eric Rohmer « L’Amour l’après-midi », laissant entrevoir une histoire torride. Ce qui est tout à fait exact.

Après s’être principalement illustré avec des thrillers psychologiques et des romans à suspens, Douglas Kennedy explore la passion amoureuse. Il réussit à nous captiver avec les affres de la vie sentimentale d’un Américain à Paris pour une femme mariée et plus âgée. L’amour n’est pas un long fleuve tranquille. C’est justement ce que raconte l’auteur en mettant l’accent sur les difficultés de l’engagement et des choix.
dissèque les imperfections du cœur humain à « la poursuite du bonheur qui n’est pas sans évoquer le titre de son troisième roman.
Douglas Kennedy qui semble bien connaître les femmes, suscite notre réflexion et curiosité. Il incite le lecteur à réfléchir sur la définition du couple. L’entente sexuelle est-elle le ciment de l’amour durable ? Peut-il résister au temps et la distance qui sépare ?

L’histoire

Sam, un jeune étudiant américain rencontre une élégante parisienne plus âgée, Isabelle. Le coup de foudre est immédiat, et sans appel. Toutefois, la belle est mariée à un homme dont la réussite est bien établie. Commence alors une liaison sulfureuse entre les deux amants qui se déroule sur 36 ans entre Paris et les Etats-Unis.
Sam souhaite beaucoup plus que ces rendez-vous furtifs de cinq-à-sept. Isabelle est-elle prête à suivre son jeune amant aux Etats-Unis et à sacrifier sa famille ? Comment Sam résiste-t-il à la frustration de cette vie morcelée ?

Pourquoi vous allez aimer

Douglas Kennedy explore et dissèque sans complaisance la passion amoureuse. Il tire et étire les fils de cette histoire sur plus de 30 ans. Cela permet une étude au scalpel de cette relation adultérine. Le couple et les choix qui engagent la vie sont les thèmes principaux du roman : « Chaque choix engage notre vie sur un sentier imprévisible, au début d’une histoire inconnue. Même si, par nature, la décision de former un couple découle de la croyance qu’on peut investir ensemble dans un avenir heureux ».
Sans mièvrerie, le narrateur analyse finement la psychologie torturée et évolutive de ses personnages.
Il s’agit bien évidemment d’un roman, mais on sent l’auteur très présent et investi dans l’histoire. S’agit-il vraiment d’une fiction ? L’auteur affirme qu’il a tout inventé mais qu’il se sert de ses expériences personnelles et de ses observations.
Le personnage principal Sam, apprécie comme Douglas Kennedy les clubs de Jazz, le cinéma et les cafés parisiens…
Les détails des scènes de vie ordinaire apportent également un ton réaliste et sincère. Un hommage particulier est rendu à la beauté des femmes mûres, ce qui est rafraîchissant dans un monde où seule la jeunesse semble compter.
Le roman est également empreint d’une agréable nostalgie du Paris des années 70.
L’auteur qui manie parfaitement la technique du roman à suspens utilise cette forme narrative pour raconter une histoire passionnelle. La lecture fluide en devient plus dynamique et addictive.
Un roman sur les tourments de l’amour que je vous conseille vivement.

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LA FEMME RÉVÉLÉE de Gaëlle Nohant

“La Femme révélée” de Gaëlle Nohant est le coup de coeur 2020 du prix du Festival du LÀC.

Ce qui n’a rien d’étonnant, la romancière n’est pas à son premier coup d’essai. Elle avait déjà fait vibrer ses lecteurs avec l’histoire réelle et terrifiante de femmes prises au piège de l’incendie du Bazar de la Charité avec « La part des flammes ». Puis, elle a ressuscité avec force le poète Robert Desnos dans « La légende d’un dormeur éveillé ».

J’ai également beaucoup apprécié cette lecture qui m’a permis de voyager au temps des années 1950 à 1970 en pleine ébullition sociale, aux côtés d’une femme courageuse tiraillée entre Chicago-Paris, son amour pour son fils et la liberté.

L’histoire…

Sous un nom d’emprunt, l’américaine Violet Lee, passionnée par la photographie, part précipitamment de Chicago, laissant derrière elle, son riche mari et son jeune fils adoré. Pour des raisons mystérieuses, elle se cache à Paris dans un hôtel sordide. Elle y découvre à travers l’objectif de son Rolleiflex le Paris des années 1950, ville éprise de liberté où le jazz enflamme les caves de Saint-Germain.
Au fil de ses rencontres, elle photographie des personnes ordinaires abîmées par la vie. Déchirée par ses passions amoureuses, l’abandon de son fils, et tiraillé entre deux continents, elle lutte pour sa liberté. Violet ne reste pas insensible au mouvement des droits civiques aux États-Unis ainsi qu’aux manifestations contre la guerre du Vietnam.
Quelles sont les raisons de sa fuite? Retrouvera-t-elle son fils ? Quel sera son destin ?

Pourquoi vous allez aimer…

Gaëlle Nohant dépeint avec subtilité la destinée d’une femme courageuse et les remous de cette époque tourmentée. Ce roman à l’écriture ciselée et parfaitement documenté réussit à transporter le lecteur dans le passé, tout en lui apportant matière à réflexion sur les injustices sociales et le racisme aux Etats-Unis.
L’écrivaine trouve les mots justes pour décrire la difficulté de l’exil et la culpabilité liée à l’abandon d’un enfant « Partir n’est pas le plus difficile… Le plus dur, c’est de se pardonner de ne pas être resté. »
La photographie tient une place importante dans cette histoire où plane l’ombre de grands noms tels que Henri Cartier Bresson, Vivian Maier…
Laissez-vous envoûter, comme moi, par cette photographe au regard plein d’humanité et par l’écriture exceptionnelle de Gaëlle Nohant.

Un grand coup de cœur pour la vie révélée d’une femme libre qui prend son destin en main et lutte contre l’adversité.

« Tu sera un homme, mon fils » de Pierre Assouline

Sandrine Bourgeois 2020

Je vous conseille de découvrir la personnalité de l’auteur du “Livre de la Jungle ” et du célèbre poème “Si” de Rudyard Kipling. Laissez vous guider par Pierre Assouline, dans l’Angleterre du début du XXème siècle.

Rudyard Kipling

Une fois de plus, Pierre Assouline, membre de l’Académie Goncourt, auteur de nombreuses biographies et romans (Simenon, Albert Londres, Camondo, Cartier-Bresson, les invités) réussit un tour de maître dans son dernier roman « Tu seras un homme, mon fils ». Il redonne vie au célèbre prix Nobel de littérature Rudyard Kipling né à Bombay et à son poème éponyme « Si ». Traduit librement en français par André Maurois, « Tu seras un homme, mon fils » exprime la bienveillance d’un père envers son fils, en lui servant de guide sur les voies de la perfection, et de la maturité.

Ce texte intemporel a inspiré de nombreuses générations et reste d’actualité. Qui était Kipling ? Que cachait-il derrière sa carapace ? Quelle relation particulière entretenait-il avec son fils ? Quel rôle a-t-il joué dans son funèbre destin ? Quelle est sa part de responsabilité ? Laissez-vous transporter au cœur d’une enquête documentée et passionnante menée par le personnage fictif et attachant de Louis Lambert, imaginé par Pierre Assouline.

Maison de Kipling où il s’établit en 1902 à Bateman’s, près de Hastings dans l’East Sussex.

L’histoire

Le jeune professeur de français Louis Lambert, marié à une femme adorable, rencontre par hasard en cure thermale dans les Pyrénées, l’illustre écrivain francophile, Rudyard Kipling. Le professeur rêve de traduire avec l’autorisation de son auteur préféré le poème “Si” qui l’obsède. La première rencontre est un échec, car Kipling se méfie des journalistes et encore plus des biographes. « …la race des biographes, laquelle, je vous le confirme, me fait horreur ». Progressivement, Louis Lambert réussit à apprivoiser l’écrivain qu’il adule.

John Kipling

Louis Lambert est convié à séjourner quelques temps en Angleterre pour perfectionner le français médiocre de John, le jeune fils attachant de Kipling peu doué pour les études. Le professeur y découvre un écrivain complexe, impérialiste, colérique, visionnaire, farouchement germanophobe qui ne laisse pas paraître ses sentiments. La première guerre mondiale éclate. Pour faire honneur à son père nationaliste, John Kipling, encore mineur, s’engage dans les troupes britanniques pour combattre aux côtés des français. Il passe outre deux handicaps, une sévère myopie et sa faible constitution. Il est déclaré disparu en 1915, laissant son père, déjà orphelin de fille, terrassé de douleur, et de culpabilité.

Le fil conducteur de l’ouvrage reste avant tout le magnifique poème de Kipling « Si » et la traduction approximative réalisée par André Maurois. « Tu seras un homme, mon fils » est au cœur du dénouement de ce récit.

Pourquoi vous allez aimer

Pierre Assouline jongle finement avec les anecdotes historiques et les références littéraires, tout en apportant émotion et sensibilité à ce roman biographique.
Le récit aborde le thème de la transmission paternelle. En découlent de nombreuses réflexions liées à  l’influence d’un père sur le destin de son fils. «Mais comme il est compliqué de devenir le fils de son père», notamment lorsque ses exigences sont si élevées. «Il faut une sacrée force de caractère pour se soustraire à cette injonction d’excellence».

Il est également poignant de suivre Kipling arpenter pendant des années les champs de batailles à la recherche d’informations et d’éventuelles traces de son fils.
Pierre Assouline a des mots puissants pour décrire la première guerre mondiale et réussit avec brio à restituer l’atmosphère du monde avant et après ce cataclysme. «Les guerres mettent tout un peuple à l’épreuve, et pas seulement ceux qui endurent la bataille. La sidération provoquée par l’hécatombe était si forte que les ravages de la grippe espagnole passait au second plan ».
Je voue une forte admiration à la belle écriture percutante de Pierre Assouline et vous laisse découvrir la personnalité passionnante et « so british » de Kipling.

Pierre Assouline au cercle de lecture des lectrices Bienveillantes octobre 2020

« Tu sera un homme, mon fils » de Pierre Assouline

Sandrine Bourgeois 2020

Je vous conseille de découvrir la personnalité de l’auteur du “Livre de la Jungle ” et du célèbre poème “Si” de Rudyard Kipling. Laissez vous guider par Pierre Assouline, dans l’Angleterre du début du XXème siècle.

Rudyard Kipling

Une fois de plus, Pierre Assouline, membre de l’Académie Goncourt, auteur de nombreuses biographies et romans (Simenon, Albert Londres, Camondo, Cartier-Bresson, les invités) réussit un tour de maître dans son dernier roman « Tu seras un homme, mon fils ». Il redonne vie au célèbre prix Nobel de littérature Rudyard Kipling né à Bombay et à son poème éponyme « Si ». Traduit librement en français par André Maurois, « Tu seras un homme, mon fils » exprime la bienveillance d’un père envers son fils, en lui servant de guide sur les voies de la perfection, et de la maturité.

Ce texte intemporel a inspiré de nombreuses générations et reste d’actualité. Qui était Kipling ? Que cachait-il derrière sa carapace ? Quelle relation particulière entretenait-il avec son fils ? Quel rôle a-t-il joué dans son funèbre destin ? Quelle est sa part de responsabilité ? Laissez-vous transporter au cœur d’une enquête documentée et passionnante menée par le personnage fictif et attachant de Louis Lambert, imaginé par Pierre Assouline.

Maison de Kipling où il s’établit en 1902 à Bateman’s, près de Hastings dans l’East Sussex.

L’histoire

Le jeune professeur de français Louis Lambert, marié à une femme adorable, rencontre par hasard en cure thermale dans les Pyrénées, l’illustre écrivain francophile, Rudyard Kipling. Le professeur rêve de traduire avec l’autorisation de son auteur préféré le poème “Si” qui l’obsède. La première rencontre est un échec, car Kipling se méfie des journalistes et encore plus des biographes. « …la race des biographes, laquelle, je vous le confirme, me fait horreur ». Progressivement, Louis Lambert réussit à apprivoiser l’écrivain qu’il adule.

John Kipling

Louis Lambert est convié à séjourner quelques temps en Angleterre pour perfectionner le français médiocre de John, le jeune fils attachant de Kipling peu doué pour les études. Le professeur y découvre un écrivain complexe, impérialiste, colérique, visionnaire, farouchement germanophobe qui ne laisse pas paraître ses sentiments. La première guerre mondiale éclate. Pour faire honneur à son père nationaliste, John Kipling, encore mineur, s’engage dans les troupes britanniques pour combattre aux côtés des français. Il passe outre deux handicaps, une sévère myopie et sa faible constitution. Il est déclaré disparu en 1915, laissant son père, déjà orphelin de fille, terrassé de douleur, et de culpabilité.

Le fil conducteur de l’ouvrage reste avant tout le magnifique poème de Kipling « Si » et la traduction approximative réalisée par André Maurois. « Tu seras un homme, mon fils » est au cœur du dénouement de ce récit.

Pourquoi vous allez aimer

Pierre Assouline jongle finement avec les anecdotes historiques et les références littéraires, tout en apportant émotion et sensibilité à ce roman biographique.
Le récit aborde le thème de la transmission paternelle. En découlent de nombreuses réflexions liées à l’influence d’un père sur le destin de son fils. «Mais comme il est compliqué de devenir le fils de son père», notamment lorsque ses exigences sont si élevées. «Il faut une sacrée force de caractère pour se soustraire à cette injonction d’excellence».

Il est également poignant de suivre Kipling arpenter pendant des années les champs de batailles à la recherche d’informations et d’éventuelles traces de son fils.
Pierre Assouline a des mots puissants pour décrire la première guerre mondiale et réussit avec brio à restituer l’atmosphère du monde avant et après ce cataclysme. «Les guerres mettent tout un peuple à l’épreuve, et pas seulement ceux qui endurent la bataille. La sidération provoquée par l’hécatombe était si forte que les ravages de la grippe espagnole passait au second plan ».
Je voue une forte admiration à la belle écriture percutante de Pierre Assouline et vous laisse découvrir la personnalité passionnante et « so british » de Kipling.

Pierre Assouline au cercle de lecture des lectrices Bienveillantes octobre 2020